Revue de Presse Numéro 4 du 21 au 28 mai 2019

Au programme cette semaine :

Les actus du 21 au 28 mai : 6 morts en accident du travail durant cette période nous amènent à 281 morts depuis le début d’année. Il y a également un grand nombre d’accident de travail très grave.

Un accident spécifique d’espace confiné : Article du parisien du 02 mars 2019. Les problématiques d’hydrocarbure et de méthane en égout dans un quartier de Ballancourt (Essonne) ayant été pris bien en amont, il n’y eu ni victime, ni explosion. Toutefois, cet article nous rappelle que, de CH4, il y en a bien plus qu’on ne le croit…

Les couleurs de l’égout, ailleurs (1/2): Article de « Les observateurs France 24 » du 30/06/2018 : En inde, 1268 personnes seraient mortes pour avoir travaillé à nettoyer latrines et égouts en 2016. Ce sont ceux de la caste des Intouchables. Nous verrons, la semaine prochaine, que ceux sont aussi de la caste chrétienne au Pakistan.

 

1 : Les actus du 21 au 29 mai :

Article du pélican (21 mai 2019) : Accident mortel : Le corps d’un homme a été découvert hier matin sur un chantier de la résidence des Manguiers à Concordia (Saint Martin). Aucun obstacle médico-légal pouvant laisser penser à une action criminelle n’a été signalé lors du constat du décès. « Il s’agirait d’un accident du travail », rapporte la gendarmerie.

Article de L’ardennais (22 mai 2019) : A La fonte ardennaise, usine spécialiste européen du moulage vertical de Vivier-au-Court, Un ouvrier de 45 ans est tombé d’une hauteur de 10 mètres. Miraculeusement, l’homme ne souffre que d’une blessure au niveau d’un doigt. Il a été évacué vers le centre hospitalier de Charleville-Mézières.

Article de Nice-Matin (21 mai 2019) Accident Mortel : Aux alentours de 11 heures, un artisan grassois âgé de 47 ans, se rend chez un client. Il stationne sa fourgonnette dans une impasse pentue. Alors qu’il descend du véhicule et ouvre les portières arrières pour prendre du matériel, l’utilitaire recule. Le quadragénaire est emporté et chute au sol, avant de passer sous l’engin. Très grièvement blessé, il est retrouvé ensanglanté contre le muret d’une propriété quelques instants plus tard par un riverain, qui alerte les secours. Malgré l’intervention rapide des pompiers, l’homme décède durant son transfert à l’hôpital. D’après les premiers éléments recueillis sur place, le frein à main aurait été mal serré.

Article de la voix du nord (22 mai 2019) : Accident mortel : Un homme de 44 ans a été décapité par des coffrages en béton de plusieurs tonnes qui ont basculé dans le vide vers 15 heures pendant une manœuvre de levage, après avoir heurté l’angle du bâtiment en construction, sur un chantier proche du quartier de La Défense à Nanterre, selon la même source. Le Parisien indique que « les blocs de béton ont alors chu, ricoché sur les 2e et premier étage de l’édifice avant de s’écraser sur l’ouvrier, qui a été tué sur le coup ». En état de choc, le grutier, âgé de 54 ans, et trois autres employés du chantier qui ont assisté à l’accident ont été pris en charge par les pompiers.

Article de 20minutes (22 mai 2019) : Un ouvrier, âgé de 30 ans, est tombé dans le puits d’une propriété située à Groisy, en Haute-Savoie.  Sa chute de six mètres de profondeur lui a causé d’importantes blessures. Les sapeurs-pompiers de la caserne de Thorens-Glières se sont mobilisés pour extraire l’homme du puits très étroit et rempli d’eau.

Article de Vosges Matin (22 mai 2019) : Un homme qui s’affairait sur l’une des machines, a vu son bras se coincer dans les cylindres. C’est son pull qui se serait pris dans les rouleaux de la machine. Cet ouvrier travaillait pour l’entreprise TOILTECH, spécialisée dans la fabrication de tissus techniques à La Chapelle devant Bruyères, près de Saint Dié.

Article du Républicain lorrain (22 mai 2019) : A Phalsbourg, un ouvrier occupé sur le chantier de construction d’un hall, a fait une chute. L’homme âgé de 43 ans vérifiait l’étanchéité du plafond lorsque pour une raison indéterminée, il est accidentellement tombé dans l’emplacement vide d’un futur escalier. Il a atterri sur une dalle quelque 3 m plus bas, se blessant sérieusement aux membres et à la tête.

Article de L’union (22 mai 2019) : Un éleveur a été gravement blessé après avoir été encorné par son taureau à Saint-Rémy-en-Bouzemont (Marne), près de Vitry le François.  Alors qu’il allait chercher ses vaches pour procéder à la traite, un éleveur âgé de 37 ans a été attaqué par le taureau qui accompagnait le troupeau. L’homme a reçu plusieurs coups de corne au thorax et dans le dos. Il a été transporté conscient en hélicoptère vers le CHU de Reims.

Article de Nice-Matin (23 mai 2019) : A Centuri (Corse), Ce jeudi 23 à 10h25, un ouvrier âgé de 39 ans a été victime d’un accident du travail, suite à une chute de matériaux. Souffrant d’un traumatisme du genou et vraisemblablement d’une fracture de la jambe gauche, il a été évacué à l’hôpital de Bastia par hélicoptère.

Article de l’Yonne républicaine (23 mai 2019) : Un accident du travail s’est produit ce jeudi, vers 11 h 30, dans la rue des Bruyères, à Charbuy. Un ouvrier s’est retrouvé à moitié enseveli alors qu’il travaillait dans une tranchée, à l’occasion de travaux sur le réseau d’assainissement. Le quinquagénaire avait de la terre jusqu’aux hanches. Blessé au genou, il a été transporté par les sapeurs-pompiers au centre hospitalier d’Auxerre.

Article du Parisien (24 mai 2019) : Accident mortel : Un ouvrier est mort jeudi après avoir fait une chute d’une quinzaine de mètres, alors qu’il intervenait sur un pylône d’une télécabine, à la station alpine des Ménuires (Savoie). Ce Savoyard de 53 ans, qui serait un employé de la société des remontées mécaniques, la SEVABEL, était en train d’intervenir sur le câble de la télécabine des Bruyères, dans le cadre d’un exercice, jeudi après-midi, lorsqu’il a chuté.

Article de la voix du nord (25 mai 2019) :  Un dramatique accident du travail s’est produit mardi en fin de matinée sur la commune d’Arbois sur un chantier prés de Besançon. Un couvreur qualifié, âgé d’une vingtaine d’années, qui effectuait la restauration des toitures, s’est coupé la main avec une scie circulaire. Des motards ont renforcé l’ambulance lors de la traversée du département du Doubs afin de pouvoir sauver cette main.

Article de 20minutes (26 mai 2019) : Accident mortel :Un des membres d’équipage, âgé de 29 ans, d’un yacht, au mouillage près des îles de Lérins, dans la baie de Cannes, est décédé samedi soir après que l’embarcation a été percutée par un autre bateau de plus de 20 m. La victime « aurait été mortellement blessée lorsqu’il virait l’ancre au moment du choc » avec la seconde embarcation. A priori, le yacht à l’origine de la collision « naviguait à une vitesse excessive », estimée à 20 nœuds dans une zone limitée à 5 nœuds Son commandant est en garde à vue depuis samedi soir.

Article de Var Matin du 27 mai 2019. Accident mortel. Un homme, qui a été grièvement blessé ce lundi 27 mai à Sainte-Maxime, a succombé à ses blessures, malgré les tentatives des pompiers pour la réanimer. L’ouvrier était stationné sur le parking du Carré Gaumont, à Sainte-Maxime, afin de décharger des baies vitrées dans un autre camion. C’est en effectuant cette opération qu’il avait reçu une baie vitrée sur lui.  Ses collègues sont sous le choc.

Article d’Objectif Gard du 27/05/2019 : Les sapeurs-pompiers du Gard ont été appelés, ce lundi vers 11h30 sur la commune de Molières-sur-Cèze. Une intervention liée à un problème technique sur un tuyau de grosse capacité d’une pompe à béton… Ce dernier, sous pression, a percuté deux ouvriers qui ont dû être transportés au centre hospitalier d’Alès pour des soins.

 

2 : Un accident spécifique en espace confiné

Essonne : explosion évitée après une pollution à l’hydrocarbure

Ballancourt, vendredi soir. La rue de Verdun a été évacuée à cause du risque d’explosion.

 

La présence d’hydrocarbure en quantité importante dans les égouts de Ballancourt a nécessité une intervention des pompiers. Les gendarmes ont évacué le secteur à cause d’un risque d’explosion vendredi soir.

Une odeur, une alerte, et en quinze minutes la rue est évacuée. Vendredi vers 20 h 30, rue de Verdun, à Ballancourt-sur-Essonne, les pompiers et les gendarmes sont intervenus pour une pollution aux hydrocarbures. « Les conséquences auraient pu être dramatiques, car la concentration de ce produit inflammable était telle qu’il y avait un risque d’explosion », indique une source proche du dossier.

Premiers sur place, les soldats du feu trouvent l’origine de ces émanations. Elles proviennent des égouts. Les gendarmes établissent un périmètre de sécurité. Trois familles sont transportées vers un gymnase de la commune. Une partie de ce liquide inflammable et volatile a été prélevée et transmise pour des analyses réalisées par la préfecture. Le reste a été pompé ou dilué. Dans la fin de soirée, les riverains ont pu regagner leur domicile.

« Impossible pour l’heure de savoir s’il s’agit d’une pollution d’origine accidentelle ou délictuelle, indique une source judiciaire. On attend déjà de connaître la nature de ce produit. » Selon les estimations provisoires, la quantité présente dans les égouts pourrait ne pas être si conséquente que prévue. Et osciller entre 50 et 80 litres « seulement ». « Ce qui pourrait correspondre à une cuve ou à un réservoir », reprend cette même source. Mais dans des canalisations qui ne contenaient aucun autre liquide, le danger était réel.

 

Florian Loisy (avec Stéphanie Auguy)

 

 

3 : Les couleurs de l’égout, ailleurs (1/2)

 Nettoyer les égouts et les WC à main nue, une purge mortelle pour les “Intouchables”

Asphyxiées sous terre, terrassées par les maladies… De nombreuses personnes meurent chaque année en Inde en raison de leur travail consistant à nettoyer les égouts, les toilettes ou encore les fosses septiques. Des décès ne donnant souvent lieu à aucune indemnité pour les familles, puisque ce travail est officiellement interdit dans le pays… depuis plus de 20 ans.

En Inde, de nombreux habitants font leurs besoins en plein air. C’est le cas des trois quarts de la population rurale – qui représente 68 % de la population totale du pays (1,2 milliard d’habitants) – notamment car beaucoup n’ont pas de WC chez eux. Cette situation engendre de graves problèmes d’insalubrité et implique de nettoyer les rues et les caniveaux régulièrement. En outre, une grande partie des toilettes ne sont pas raccordées aux égouts, ce qui suppose de les vider fréquemment.

Nettoyer les excréments dans les rues et les caniveaux, déboucher les canalisations et les égouts, vider les fosses septiques… Ces tâches sont presque toujours effectuées à main nue – au mieux avec quelques outils comme des seaux – par des Intouchables (ou Dalits), des individus exclus du système des castes et se trouvant au plus bas de l’échelle sociale, et plus précisément par des femmes. Ils seraient plusieurs centaines de milliers à faire ce travail, voire plusieurs millions selon certaines sources.

Photo publiée sur la page Facebook de Safaai Karmachari Andolan. Presque la totalité de ces travailleurs sont des femmes.

Selon Safaai Karmachari Andolan, une organisation luttant pour l’éradication de ces métiers, 1 268 personnes seraient mortes en travaillant dans les égouts entre 2014 et 2016, bien que le nombre de ces décès soit difficile à évaluer précisément.

“Beaucoup de travailleurs meurent asphyxiés dans les bouches d’égout »

Nikhil Srivastav est un chercheur indien de l’institut RICE, travaillant notamment sur les questions sanitaires dans les villages.

La plupart des décès surviennent dans les bouches d’égout, à cause du manque d’oxygène. Certains meurent également sous terre après avoir inhalé des gaz nocifs, comme le monoxyde de carbone, ou en raison d’accidents, tels que des explosions de gaz ou des effondrements.

Par ailleurs, les travailleurs en contact avec les excréments humains et les ordures ont très souvent des problèmes de santé : nausées, vomissements, diarrhée, maux de tête, infections aux yeux, anémie, maladies respiratoires et de la peau… Ce n’est pas étonnant puisqu’ils travaillent généralement sans aucune protection, car on ne leur en donne pas. Sans compter qu’ils n’ont en général pas accès aux services de santé. [Ces travailleurs sont souvent exclus des programmes de santé en raison de leur appartenance sociale. Environ 80 % des personnes travaillant dans les égouts mourraient donc avant l’âge de la retraite, selon le syndicat des égoutiers, NDLR.]

D’après la Cour suprême, en cas de décès, les familles peuvent théoriquement obtenir un million de roupies [13 355 euros, sachant que ces travailleurs gagnent généralement autour de 40 euros par mois, NDLR]. Mais en réalité, cette indemnité est très difficile à obtenir puisque les autorités font comme si ce travail n’existait pas, dans la mesure où il est officiellement interdit par la loi.

De fait, l’embauche de personnes pour enlever manuellement les excréments humains est interdite par la loi depuis 1993. Une nouvelle loi a ensuite durci les sanctions en 2013 : enfreindre la législation est désormais passible d’une peine allant jusqu’à cinq ans de prison et 50 000 roupies d’amende (soit 668 euros).

“Ces lois ont aggravé la situation des travailleurs”

On pourrait penser que ces lois sont une bonne chose, mais elles n’ont pas fait disparaître ces pratiques et personne n’a jamais été condamné depuis 23 ans.

La loi de 1993 a même aggravé la situation des travailleurs. D’une part, ils ont continué à faire le même travail qu’avant, mais en ayant peur d’être punis. D’autre part, de nombreuses municipalités ont officiellement cessé d’employer des personnes pour réaliser ces tâches. Mais comme il faut bien que les villes soient nettoyées et qu’elles n’ont généralement pas investi pour mécaniser ce travail, elles l’ont externalisé auprès de sociétés privées. Sauf que ces dernières sont généralement encore moins regardantes concernant l’hygiène et la sécurité… Du coup, les autorités ont une attitude un peu hypocrite par rapport à cette question.

Enfin, la loi de 2013 est censée aider les travailleurs à se réorienter, sauf qu’elle ne se penche absolument pas sur l’ostracisme dont ils sont victimes quand ils souhaitent changer de travail. Dans les zones rurales par exemple, comme tout le monde se connaît, si l’un d’eux essaie d’ouvrir une petite épicerie, il aura probablement très peu de clients, en raison de son statut social de Dalit. Bien que la Constitution indienne interdise de discriminer quelqu’un en raison de sa caste, un quart de la population continue en effet d’éviter tout contact avec les Dalits. [Ces derniers sont victimes de discrimination permanentes, dans tous les secteurs, NDLR.]

 

Article écrit en collaboration avec Chloé Lauvergnier, Journaliste francophone